dimanche 17 février 2013

L'anti-Tintin au Congo


L’histoire commence comme une légende de marins : 4 hommes d’équipage rassemblés sur le pont d’un navire britannique écoutent Marlow, un des leurs, raconter comment il a remonté un fleuve africain au cœur du Congo. Le but de l’expédition était de retrouver un blanc, un dénommé Kurtz, chef d’un comptoir commercial avancé d’une compagnie belge. Un homme que l’on a décrit à Marlow comme extrêmement instruit et talentueux.


Voilà en quelques mots le résumé d' « Au cœur des ténèbres », court roman exceptionnel écrit par Joseph Conrad à l’aube du XXème siècle.

A priori, rien à voir avec notre célèbre reporter à la houppette et, si on met de côté que ce blog parle de bande-dessinée, il est vrai que vous êtes en droit de vous demander à ce stade ce que vient faire Tintin dans le titre de ce post (à part, peut-être, pour les mots « Congo » et « belge »).

Eh bien c’est que les deux ouvrages ont été écrits par des européens à seulement trois décennies d’intervalle (ce qui, à l’échelle de l’humanité, ressemble à un éternuement, vous en conviendrez) et que les deux parlent de la colonisation africaine par l’Europe. Et, petits malins que vous êtes, vous avez déjà compris par le titre de cet article que les deux livres n’en donnent pas vraiment la même vision.





Les premières images qui reviennent en général de « Tintin au Congo » sont celles où on voit le héros arpenter la brousse africaine, fusil à la main, tenue légère, Milou pas loin. La ballade, sous le trait lumineux d’Hergé, paraît presque bucolique bien qu’on y assiste à un vrai carnage d’animaux.


Rappelez-vous en particulier de Tintin portant sur ses épaules les défenses récupérées sur le cadavre d’un éléphant ; c’est précisément le trafic de l’ivoire,  avec tous ses excès et sa violence, qui est au cœur du roman de Conrad. 

A cette époque, « L’or blanc » avait été la première motivation du roi Léopold II de Belgique pour s’accaparer en son nom le Congo et autant vous dire que ce commerce a été source de brutalités abominables.




Autre analogie troublante: souvenez-vous aussi de cette dernière planche de l’album, où l’on voit les habitants d’un village africain honorer les statues de Tintin et Milou, pareils à des divinités païennes. Lorsque Charles Marlow retrouve Kurtz, celui-ci est devenu une sorte de demi-dieu régnant sur des tribus qui viennent lui apporter des quantités astronomiques d’ivoire telles des offrandes sacrificielles.

Difficile de vous en dire plus sans vous gâcher la découverte de l'ouvrage de Conrad. Si vous êtes de ceux que la lecture de romans, mêmes courts, rebutent, vous pouvez vous rabattre avec bonheur sur la version audio d' "Au Coeur Des Ténèbres" lue par Denis Lavant. La voix de ce dernier, éraillée et monocorde, sied à merveille à cette histoire de marin et au style évocateur de l'auteur.
Bref, vous n’avez plus aucune excuse…



2 commentaires:

  1. je prends le temps des que je peux pour lire cet ouvrage...je donnerai après coup mon petit avis en tout cas le parallèle avec Tintin semble très inintéressant...

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  2. Tiens-nous au courant de ton ressenti après avoir lu le bouquin. Certains mettent un pied dans l'oeuvre de Conrad et n'en ressorte plus !

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